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Astérix chez les chercheurs

Interview

 

Astérix chez les Pictes, trente-cinquième épisode de la bande dessinée à succès d'Albert Uderzo et René Goscinny , vient de sortir. Cependant, malgré le succès médiatique de cet événement, la réalité de la vie de nos ancêtres reste assez floue. Emmanuel Arbabe, spécialiste des institutions en Gaule Romaine et membre de la Société française de numismatique, nous éclaire sur le sujet.

 

Pour les (grands) enfants qui vous liront : cette bande dessinée est-elle fidèle à la réalité de la Gaule avant sa conquête par l'armée romaine ?

 

Astérix est connu pour ne pas être fidèle à la réalité historique ! Il reflète des idées souvent vieilles d'un siècle ou plus, comme le cliché des huttes rondes qui n'ont jamais existé. Mais Goscinny reste fidèle sur certains points, par exemple la toponymie et les noms des divinités gauloises, Toutatis, Belenos... Le caractère belliqueux du peuple gaulois n'est pas non plus si éloigné des faits, tout comme les composantes de la société. Mais la réalité est cependant réagencée selon les envies des scénaristes.

 

Ces ouvrages nous ont donc transmis beaucoup d'idées reçues? 

 

Oui, les Gaulois sont présentés comme un peuple de chasseurs, or ce sont des agriculteurs. La Gaule était un territoire agraire, donc très éloignée de la vision « barbare » que beaucoup s'en font.

 

À propos de cette « barbarie gauloise », la conquête romaine a-t-elle modifié la qualité de vie ?

 

La principale amélioration des standards de vie vient de la « pax romana », c'est-à-dire la pacification souvent forcée des territoires conquis ; les peuples ne se font plus la guerre, les razzias décrites par César cessent. Rome fait fructifier le commerce, ce dont les Gaulois profitent.

 

Vous avez participé, sous la direction de Matthieu Poux (professeur d'archéologie à l'université Lyon II) aux fouilles de Corent, ancienne capitale du peuple arverne, près de Clermont-Ferrand. Avez-vous déniché des trésors ?

 

Quelques pièces uniques ont pu être trouvées, mais ce sont souvent les objets du quotidien qui nous en apprennent le plus. Les monnaies et les céramiques par exemple, que l'on trouve en quantité. Cependant la fouille déplace d'énormes masses de terre et des choses nous échappent. Malheureusement des prospecteurs amateurs passent avec des détecteurs de métaux, ce que nous appelons vulgairement des « poêles à frire », et pillent ce que nous avons laissé passer.

 

Ce phénomène des « poêles à frire » semble vous révolter ?

 

Oui, les « chercheurs du dimanche » détruisent des sites. Ils y vont la nuit, creusent et saccagent le terrain. Or, une fois qu'un niveau archéologique est détruit, les informations qu'il contenait sont irrémédiablement perdues. Ces pillards trouvent parfois des pièces quasi-uniques et les gardent ou les revendent. C'est un désastre ! Les trouvailles ne sont plus contextualisées ce qui les rend en grande partie muettes. La loi punit cela... Malheureusement, elle est peu appliquée. Nous espérons que cela va changer à l'avenir, et en attendant, résistons encore et toujours à l'envahisseur !

 

Par Manon Griboux

le 29 mars 2014

 

 

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