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La poupée ivre

Chronique

 

Seule dans la grande maison aux murs gris, la poupée flotte entre deux parois, n'ayant pour seul appui que ses mains et ses frêles jambes qui soutiennent son corps d'enfant mis à nu. Une étoile se meurt dans l'embrasure de la porte. La voix de Sia s'élève; la poupée de chiffon prend vie, et sombre dans la folie.

 

Dévoilé il y a à peine une semaine, le nouveau clip de Sia, Chandelier, compte déjà plusieurs millions de vues sur le net. Et il y a de quoi: dans cette vidéo, Maddie Ziegler, danseuse en vogue aux États-Unis, est emportée dans une forme de transe, entre folie et génie artistique. La tête ornée d'une perruque blonde à l'image de la coiffure de la chanteuse, elle paraît, à la manière d'une marionnette, laisser son corps la guider; la musique la plonge alors dans le plus étrange des délires.

 

Le corps longiligne devient instrument de la folie, instrument de la voix de Sia qui dans un cri déchirant, clame qu'elle veut "voler comme un oiseau à travers la nuit": une parfaite adéquation avec cette jeune fille qui semble prisonnière d'une immense cage. Ce sont alors ses jambes qui mènent la danse: elle se balance, se cogne contre les murs, se frappe le ventre avec une rigidité d'automate. Tout n'est que jeu, et le corps se fait cri.

 

La jeune fille s'oublie. Elle tourbillonne, se cache, se découvre. La musique semble être une voix qui résonne dans sa tête, la même qu'entendent les schizophrènes dans leurs plus profondes crises. À ce stade, le chant est devenu une transe: plus rien n'empêche la poupée ivre de danser, jusqu'à se rouler par terre.

La musique s'arrête. Elle salue, dans l'embrasure d'un couloir sombre: sans la voix qui le soutient, le corps n'a plus rien à donner.

 

 

 

Sia, Chandelier

1000 forms of fears, album Ã  paraître courant été 2014

DIrector's cut: Sia & Daniel Askill

Danseuse: Maddie Ziegler

 

Par Manon Griboux

le 10 février 2014

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