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Quand la calligraphie se modernise

Portrait

 

Ramzi Saibi, jeune artiste franco-tunisien, exprime à travers son art un condensé de culture, de rupture mais aussi d'ouverture. Témoignage d'un homme original et mystérieux qui ne dévoile pas tous ses secrets mais à qui tous les secrets sont confiés pour finir sur toile ou sur papier couché. Il se définit comme un artiste calligraphe contemporain qui veut tout expérimenter à travers son art mais aussi à travers la rencontre des autres.

 

Il peut être qualifié de jeune et timide étudiant en littérature et civilisations arabes ou encore un jeune qui travaille dans la culture mais il s'agit d'un artiste-calligraphe nommé Ramzi Saibi. Son cheminement artistique s'est fait aux détours de rencontres hasardeuses mais entrainantes qui lui ont permis de se lancer sous les projecteurs du public pour sortir de l'anonymat et se projeter dans toutes formes d'expressions artistiques auxquelles il n'avait pas pensé.

 

Depuis son enfance, Ramzi, qui est né en France et d'origine tunisienne, dont le prénom veut dire "symbole" en arabe, grandit dans une double culture qui a fait son essence artistique. Très jeune, il se passionne pour l'écriture et particulièrement pour l'écriture arabe, il considère les lettres arabes comme des dessins, ce sont des formes qu'il essaye de reproduire sans connaître leurs significations. À partir de treize ans, il commence à s'intéresser plus consciemment à la calligraphie, il prend quelques cours et s'entoure de calligraphes, en plus de la calligraphie, il prend part à des ateliers artistiques dans une boutique sur Paris comme Rougié plé.

 

Autour de la vingtaine, il prend exemple sur des calligraphes qui lui apportent inspiration et vocation à l'art calligraphique, ses modèles sont Abdelhamid Jouan ou Yacin Deradra. Il prend des cours avec ce dernier malgré son petit budget étudiant. Bien que le fait d'étudier de manière conventionnelle la calligraphie soit nécessaire pour dessiner chaque lettre de l'alphabet arabe pendant deux heures afin de connaître la hauteur des points et les gestes précis, Ramzi commence à se lasser du geste calligraphique et se détache de la tradition pour tendre vers la nouveauté et la modernité.

 

Il n'ose pas encore montrer ses prouesses artistiques car il craint que son style ne soit pas apprécié car il est à contre-courant de la calligraphie classique, il ne se désigne pas calligraphe en tant que tel car il n'a pas toutes les connaissances en la matière mais bien qu'il ait un profond respect pour les anciens, il veut faire selon son inspiration, c'est pourquoi il se désigne artiste-calligraphe car la base de son inspiration est la calligraphie mais il en fait un nouvel art, à sa manière.

 

Poursuivant ses objectifs de vie, il travaille dans le domaine culturel, anime les réseaux sociaux pour la promotion d'artistes chanteurs ou autres, son art est toujours en sommeil, il garde sa passion secrète et continue à la développer. Il présente son travail à un manager artistique sans dire qu'il en était l'auteur et c'est le début de l'aventure, l'artiste est révélé. Ses proches le soutiennent, son art calligraphique plait et l'œil d'un professionnel le rassure.

 

Il retrouve le plaisir de faire sa calligraphie un véritable art, sans peur du jugement car ce qui compte c'est que cela plait, il assume pleinement son style et c'est en 2010 qu'il lance sa première exposition dans un festival de danse du monde à l'entrée de la salle de concert. C'est le début de l'aventure puis en 2011, il travaille sur des pochettes d'album, des logos et d'autres propositions se présentent à lui.

 

Il travaille sur différents supports et d'une manière tout à fait innovante car la calligraphie classique utilise le bâton de bambou appelé qalam en arabe mais ce support ne suffit pas et ne convient pas à de grandes surfaces mais aussi il n'y a pas un grand choix de couleurs. Sa matière préférée est la toile ou le papier couché car il y a un meilleur rendu de l'encre. Il peut utiliser des morceaux de carton coupés en biseau ou encore des feutres coupés en biseau qui conviennent parfaitement à la calligraphie mais aussi il travaille à la bombe de peinture.

 

C'est là que la fusion culturelle se fait, faire des calligraphies-graffitis est la preuve d'une volonté d'être le témoignage de son temps. Ses œuvres sont souvent accompagnées de citations proverbiales ou de citations de chansons qui marquent son univers artistique et culturel. Une de ses œuvres, exposées à Sciences Po sur Paris en 2014, est le titre d'une chanson Kelemti Horra qui signifie "ma parole est libre" d'Amal Mathlouti qui est une chanteuse interdite en Tunisie sous Bénali. Cette inspiration lui vient à la période des révolutions arabes et plus particulièrement la révolution tunisienne.

 

L'aventure se poursuit en 2012 et commence la course aux expositions qui se font de plus en plus nombreuses. Il expose à la maison des associations dans le 15ème arrondissement de Paris. Il participe à plusieurs événements sur Paris comme la Nuit Blanche qu'il passe à l'INALCO où son exposition est présentée sous la mélodie des différentes langues du monde.

Il participe à plusieurs festivals de danse où il fait des live performances en  fond de scène au confins de l'Orient; il en a fait plusieurs en Algérie au festival de CASIF à Alger et deux autres festivals à Sétif. De plus, il participe à des ateliers pour faire découvrir aux enfants l'art de la calligraphie sur Paris.

 

Ses inspirations sont multiples et ses projets sont nombreux, il veut contribuer aux dialogues entre les cultures, il travaille depuis peu à l'art photographique pour cet été 2014, light graffiti project où il calligraphie sur des photos la nuit sur Paris avec des néons. Ramzi Saibi, issu de la génération Y, est un mélange artistique authentique qui défend des valeurs universelles et participe à un art utile sur le plan social et culturel. Son identité artistique se résume en ses termes : "ce que je fais c'est moi".

 

(http://www.ramzisaibi.com)

le 5 mai 2014

Par Zouina Hellal

 

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